Comme tous les étudiants de la faculté de droit civil et de common law d’uOttawa, vous avez dû recevoir un message vous invitant à vous inscrire et à déposer votre candidature pour un des concours de plaidoirie auxquels notre faculté participe. Si vous hésitez, que vous n’êtes pas certains « d’avoir ce qu’il faut pour participer » ou que vous êtes certains que cette expérience vous plairait, vous êtes au bon endroit ! À mon retour de Toronto, où j’ai eu la chance de plaider dans l’équipe de droit civil avec Sophie OUELLET, Rachel JASMIN et Simon FOURNIER pour le concours FOX, j’ai eu envie de vous faire part de cette expérience. Le but est de vous dévoiler ce qui se cache derrière les concours et leur préparation, mais également de vous fournir des réponses et des conseils afin de maximiser vos chances de réussite et avoir beaucoup de plaisir !
Les membres de notre équipe vous diront : « le concours a été la meilleure expérience universitaire possible ! », et pour ma part « c’est l’expérience qui m’a le plus apporté de façon concrète pendant mon bac ! ». Mais, qu’est ce qui fait de cette expérience quelque chose d’unique ?
Tout d’abord, vous allez passer par un processus d’entrevues. Pendant quinze minutes, vous allez parler d’un sujet qui vous plait, devant un panel de trois personnes : souvent une personne de l’administration de la faculté, le professeur et le coach qui supervisent le concours. Vous serez en concurrence avec des personnes qui ont vraisemblablement beaucoup de talent. Ne doutez pas pour autant de vous ou de vos capacités, le plus important c’est d’être soi-même, de montrer qui vous êtes. Cependant, il faut aussi être prêts à répondre à des questions, être le plus naturel possible. Et si vous vous en sortez avec brio et que vous pensez avoir été une image de la perfection, attendez donc vos soumissions orales… vous verrez alors où vous en étiez et le chemin que vous avez parcouru !
Une fois que vous avez obtenu la réponse quant à votre sélection au concours, deux options :
La première : malheureusement, le concours, pour vous, ce ne sera pas cette année. Pour maximiser vos chances, passez les entrevues lorsque vous êtes encore en première année, cela vous permettra de réessayer l’année suivante et ce, avec une meilleure préparation. Vous aurez le temps de travailler votre posture, votre voix, votre prononciation ou encore éliminer quelques tics (on en a tous !).
La seconde : vous êtes retenus. Félicitations, vous commencez la grande aventure ! Vous êtes alors prêt à accepter d’incalculables heures de travail, à ne vivre que pour le concours et à acquérir de nouvelles capacités juridiques en un temps éclair. Vous allez donc rencontrer dès que possible les membres de votre équipe. Pourquoi ? Tout d’abord, parce qu’il y a une forte probabilité que vous ne les connaissiez pas et il est toujours agréable de mettre un visage sur un nom. Ensuite, vous allez devoir travailler en équipe. Connaître le caractère, les forces et faiblesses de chacun est primordial pour que le travail se fasse impeccablement et dans la bonne humeur. Enfin, faire un concours de plaidoirie universitaire c’est rencontrer du monde, beaucoup de monde ! Des élèves et des professeurs d’autres universités, des juges, des avocats… Alors rencontrer ses collègues n’est que la première étape.
Ensuite, si vous en avez la chance, vous aurez peut-être déjà quelques bases dans le domaine sur lequel porte votre concours, grâce à un cours de droit, de la curiosité personnelle ou un projet de recherche. Sinon, vous n’avez aucune idée de quoi il s’agit. Oups… Pas de panique ! Pensez à l’équipe du Fox cette année (la nôtre !!!) qui n’avait jamais fait de propriété intellectuelle. Cela ne nous a pas handicapé, à l’inverse, nous avons été galvanisés et étions tous les quatre heureux de relever le défi. Alors, voyez, pas d’affolement, ayez confiance en vous, mais aussi en vos capacités de travail…
Quel que soit le cas dans lequel vous vous trouvez, il est fortement recommandé de regarder, durant l’été, les cas et problèmes des concours des années précédentes. Pour les plus studieux, lire un ouvrage de doctrine qui survole le domaine dans son ensemble peut également s’avérer utile pour replacer le problème dans son contexte une fois que ce dernier est dévoilé.
Jusqu’ici, vous êtes dans les eaux de la théorie et cela va se poursuivre encore un petit bout de temps. Après des mois d’anticipation et de questionnement, le cas sur lequel vous allez travailler pendant plusieurs mois arrive, et là, c’est Noël avant Noël. Dans votre enthousiasme, vous allez tous commencer une recherche générale. Malgré votre entrain, restez organisés ! Partagez votre recherche avec tous les membres de l’équipe, quatre têtes qui recherchent la même chose est une perte de temps et d’énergie. C’est du gros bon sens, comme on dit, mais souvent tout ce zèle nous aveugle.
Arrive alors le temps où les rôles sont assignés dans l’équipe : demandeurs, défendeurs, appelants, intimés. Je ne vais pas vous le cacher, c’est un moment crucial. Soit vous vous connaissez tous suffisamment et vous faites des choix en toute connaissance de cause, choix qui se révèleront vraisemblablement être les bons, soit vous découvrez comment travailler avec votre coéquipier après la distribution des rôles et cela peut très bien fonctionné, comme pas du tout. À ce moment là, vous allez bénéficier de l’expérience de votre coach et du professeur qui vous supervise, des solutions vont être trouvées.
Pour les personnes qui doivent écrire un mémoire ou une procédure en vue du procès ; vous allez vous retrouver dans la situation suivante. Voyez cette page à gauche avec toute votre recherche, vos sources, la législation, jurisprudence, doctrine et cette page blanche à droite qui vous nargue… Vous êtes arrivés dans la pratique ! Les arguments qui sont dans votre tête doivent être mis sur papier et c’est plus compliqué que ce qu’il n’y paraît. L’astuce : ne pas avoir peur d’écrire, de faire un premier jet. On ne vous demandera pas quelque chose d’excellent, mais de produire un document où tout y est, ou presque. Travailler et retravailler les arguments et leur structure ne peut se faire que s’ils sont déjà physiquement devant vous.
Petit conseil, du gros bon sens, encore une fois… Il faut tout référencer pendant votre recherche, à chaque fois que vous faites de la recherche, sinon quand arrive le temps d’écrire votre factum, cela risque d’être un cauchemar. « J’ai lu ça quelque part, mais je ne sais plus où » : cette phrase est horrible à entendre parce qu’arrivé à ce point, vous aurez lu des centaines de pages et si vous n’avez pas fait de résumés, ou noté les paragraphes des décisions, vous allez devoir recommencer votre recherche ; et à côté, le guide McGill va vous paraître une véritable partie de plaisir.
Une fois le mémoire et la procédure rendus, célébrez la réalisation de ce long travail. Vous aurez eu, j’en suis certaine, beaucoup de plaisir à découvrir un nouveau sujet, à affiner vos capacités de recherche et à travailler avec votre partenaire. Forcément, il y aura également eu quelques moments plus difficiles. Alors, cette pizza, que vous allez manger à minuit le soir de la remise de vos soumissions écrites, va être la meilleure que vous aurez mangé depuis le début de cette aventure. Il est essentiel de prendre le temps de regarder le travail accompli avant de se remettre à travailler, cette fois-ci pour les soumissions orales.
Travaillé vous avez… et travaillez encore, vous allez !!!
Et oui, le travail sur les soumissions orales est l’un des plus stimulant, mais également le plus exigeant. Vous allez vous éloigner irrémédiablement de ce que vos cours universitaires vous auront appris. À ce stade, vous connaissez vos arguments, votre dossier, il n’y a plus qu’à les dire. Grave erreur, ce que vous aurez écrit sera excellent, mais ce n’est pas ce que le juge voudra entendre. Vous allez donc devoir réécrire vos arguments de manière à les vulgariser, les rendre plus fluides, choisir minutieusement vos exemples pour illustrer vos propos. Vous allez également réapprendre toute la jurisprudence que vous aurez utilisée, et vérifier qu’aucune décision pouvant influencer votre cas n’a été rendue depuis que vous avez déposé vos soumissions écrites.
Les pratiques orales organisées par la faculté sont à la fois le pire et le meilleur moment de ce marathon, que vous courez à la vitesse d’un cent mètre depuis déjà quelques mois. Je m’explique : vous allez dévoiler votre travail à des professeurs et des avocats spécialement venus pour vous écouter. Vous voulez prouver que vous maîtrisez le sujet, que vous êtes prêts et que vous avez fait du bon travail. En d’autres termes, vous vous mettez beaucoup de stress sur les épaules. Ensuite, il y a cette question à laquelle vous n’aviez pas pensé, et cette autre également, ah oui et celles-ci aussi… Ne vous découragez pas ! Vous connaissez le dossier, le droit, prenez une grande respiration, réfléchissez et répondez. Il vaut mieux ne pas savoir répondre à ce comment dans les murs de l’université, que le jour J devant le panel du concours.
Plaidez votre cause devant le miroir, sous la douche, devant votre famille, des amis, des professeurs et des collègues de classe. Ces longues heures de pratique, les remarques et conseils que vous allez recevoir vont vous conduire très loin. Vous allez les mettre en application, corriger certaines choses et, à la seconde séance de pratique, vous serez déjà plus à votre aise, sûr de vous et vous aurez du plaisir à plaider votre cause. Chacune des séances va vous rendre plus confiant de votre engagement et de votre travail. Et surtout, n’ayez pas peur de regarder en arrière pour mesurer le chemin parcouru.
Enfin, le grand jour arrive, vous allez « plaider pour de vrai » devant le panel du concours. Vous verrez, cette expérience va vous étonner : vous serez stressés, mais ce sera un bon stress, puisque vous serez prêts, vous aurez hâte. La sensation qui va vous envelopper lors de votre plaidoirie est unique, elle va déterminer si cette pratique est faite pour vous ou non.
Les jours que vous allez passer lors de la compétition seront les plus agréables et les plus excitants de votre parcours. La ligne d’arrivée est proche, vous donnerez tout pour mettre en valeur le travail que vous aurez effectué jusque-là. Vous voudrez vous amuser et ce, même durant vos plaidoiries, en vous disant, par exemple, comme je l’ai fait : « Cette question a été formulée ainsi pour me piéger. Je vais me faire un plaisir de montrer que je ne suis pas dupe et ma réponse va fuser comme un revers lifté au tennis ». Cette pensée est tellement satisfaisante. Les styles de plaidoirie sont différents, le ressenti des juges aussi, mais à la fin, cela ne peut que bénéficier à votre future pratique.
Si, lors de vos rondes de plaidoiries, vous avez la chance d’avoir d’excellents commentaires de la part des juges qui sont impressionnés par la qualité de votre travail, de vos connaissances sur le sujet et par votre style de plaidoirie, ce sera là, la plus belle reconnaissance de notre travail acharné. Que vous gagnez un prix ou non, vous aurez relevé votre défi personnel si vous recevez, de la part des juges, des commentaires positifs dont vous n’auriez même pas rêvé. Cela a certainement été un des moments les plus émouvants pour Sophie OUELLET et moi-même.
Pour conclure, un concours de plaidoirie est bien plus qu’un simple concours, c’est une occasion de développer de réelles capacités juridiques. C’est une expérience qui forge un lien unique entre les membres d’une équipe. Une expérience exceptionnelle qu’il vous tardera d’entreprendre à nouveau, une fois terminée. Tout cela peut paraître très intimidant, mais il ne faut pas avoir peur de se lancer. Chaque étudiant de deuxième ou de troisième année, qui souhaite devenir avocat, devrait s’inscrire à un concours de plaidoirie juste pour avoir la chance de ressentir l’émotion de sa première plaidoirie. Un membre de notre équipe me disait d’ailleurs, il y a quelques jours : « Depuis le retour du concours, je n’ai qu’une envie, plaider ma prochaine cause ». Je vous invite donc tous à déposer vos candidatures avant le 6 mars, et à tenter l’expérience.
Dernier petit rappel : pour l’année 2019-2020, la faculté de droit civil propose à ses étudiants de participer aux concours suivants : le FOX (propriété intellectuelle) le JESSUP (droit international), le LASKIN (droit administrait et droit constitutionnel), le MIGNAULT (droit civil), la Simulation des Nations-Unies (droit international), le SOPINKA (droit pénal), et enfin le KAWASKIMHON (droit autochtone).
Je souhaiterais chaleureusement remercier les membres de l’équipe du concours FOX, Sophie, Rachel et Simon, pour leur témoignage après le concours. Je souhaiterais également remercier notre coach Me Maxime DESFORGES pour le travail qu’il a effectué auprès de notre équipe. Enfin, tous nos remerciements à Mme Mistrale GOUDREAU, Mme QUAID ainsi qu’à toutes les personnes devant qui nous avons plaidé avant la compétition pour leurs encouragements et précieux conseils. Et, sans oublier, bien évidemment, nos remerciements à la faculté de droit civil de l’Université d’Ottawa pour nous avoir permis de vivre cette belle expérience.
Kelly FORESTIER