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ÉTUDIANTS DES RÉSIDENCES : OÙ IRONT-ILS?

Plusieurs étudiants des universités canadiennes ont été invités (lire obligés) à quitter leurs résidences la semaine dernière, en plein cœur de la crise sanitaire de la COVID-19 qui secoue le monde en ce moment. Ces évictions des résidences universitaires sont censées être un moyen d’assurer la sécurité des étudiants qui vivent en résidence, selon les administrations universitaires.

Il est important de noter qu’en grande partie, les universités font mention de mesures spéciales prises pour des étudiants qui ne peuvent pas quitter les résidences, parce qu’ils ne peuvent pas retourner dans leur pays d’origine, par exemple. Cependant, les solutions alternatives offertes par les universités pour ceux qui s’avèrent incapables de trouver un autre logement restent inconnues et un peu vagues. 

Protection

Au Québec particulièrement, le droit au logement des étudiants est protégé par l’article 1979 du Code civil du Québec, qui donne le droit au maintien des lieux à une personne inscrite à temps plein dans un établissement d’enseignement. Ceci veut donc dire qu’en théorie, les universités doivent offrir un logement équivalent aux étudiants, si elles veulent obliger ces derniers à quitter les résidences. 

J’ai eu l’opportunité de m’entretenir avec une étudiante de l’Université d’Ottawa qui a dû quitter son logement après l’annonce de la fermeture des résidences. Elle m’a raconté la confusion qu’elle a ressenti lorsqu’elle a reçu le courriel, le 18 mars, qui lui demandait d’évacuer les lieux au plus tard le 22 mars. Cette étudiante avait déjà demandé de rester dans sa chambre pour la session prochaine, et donc elle ne comprenait pas l’utilité de devoir débourser pour louer un camion et de vider sa chambre, pour ensuite refaire ce même processus la session prochaine. 

Cette étudiante m’a surtout fait comprendre le sentiment de panique ressenti lorsqu’elle a reçu la lettre d’évacuation alors qu’elle avait déjà quitté Ottawa et était retournée chez elle dans sa ville natale auprès de ses parents, car l’Université avait demandé aux étudiants de trouver un moyen de s’isoler. Quelques jours plus tard, elle a reçu un nouveau courriel lui demandant de vider sa chambre. 

L’étudiante m’expliquait qu’une centaine de personnes vivaient dans sa résidence, et que, faute de délai suffisamment long pour vider leurs chambres, tous ces étudiants et leurs aidants ont dû se côtoyer de près dans la résidence durant ce processus. Souffrant d’asthme et sous une contrainte temporelle, elle a été obligée de trouver une façon de déménager rapidement. Le fait de côtoyer plusieurs personnes dans les corridors de la résidence, le fait de constater la panique de tous et de voir plusieurs situations crève-cœur durant cette crise sanitaire a causé un sérieux stress auprès de cette étudiante. 

Il n’y a pas de discussion là-dessus : il faut tout faire pour atténuer les conséquences de cette crise. Mais au-delà de la loi et de la crise sanitaire, il y a l’étudiant en fin de session, qui vit une situation difficile et qui est très souvent seul. Une dimension d’insécurité a été ajoutée à la vie de ceux qui n’ont nulle part où aller et de ceux qui n’ont personne pour les aider.

Les jeunes étudiants sont peut-être un peu plus protégés à cause de leur âge, contre la virulence de ce virus, mais il ne faut pas sous-estimer l’ampleur de la crise qui les secoue non seulement physiquement mais aussi du point de vue de leur santé mentale. Malgré toutes les mesures et le soutien offert par l’Université, il reste que plusieurs étudiants sont des jeunes qui quittent leur famille pour la première fois. C’est une première expérience d’autonomie qui est secouée par cette crise et cette confusion généralisée. 

J’ai beaucoup réfléchi à l’angoisse que provoque cette crise. Certains d’entre nous sommes entourés de nos familles, nos conjoints, nos amis… Néanmoins, chacun est seul dans son vécu face à ces moments incertains. Ceci vaut pour tous. Cependant, durant ces moments, notre défi personnel et collectif devrait être de continuer à puiser au fond de nous-même les sentiments de compassion et de solidarité pour pouvoir s’en sortir tous ensemble. Car après cette crise, ce qui restera seront ces moments où nous avons tendu virtuellement notre main vers l’autre en lui envoyant des messages d’amitié, en trouvant les mots justes pour exprimer un sentiment de solidarité. Sans cela, quelle impression notre indifférence laissera-t-elle à ceux et celles qui sont oubliés par le système ?

Kami Temisjian

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