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Compagnie d’assurances Missisquoi c. Constructions Reliance inc. : un bref résumé de l’interprétation des exclusions aux polices d’assurance responsabilité en construction

Les problèmes d’interprétation en droit des assurances sont tout aussi nombreux que les vieux remèdes de grand-mère ; on en connaît plusieurs! On peut noter parmi ceux-ci, l’interprétation des exclusions et des exceptions aux exclusions dans les polices d’assurances responsabilité civile globale du chantier (Wrap-Up) dans le domaine de la construction. Une décision récente rendue par la Cour Supérieure du Québec, laquelle fait actuellement l’objet d’un pourvoi devant la Cour d’appel du Québec, suscite d’importantes questions en ce qui concerne l’assurance responsabilité Wrap-Up.

L’assurance Wrap-Up offre une protection distincte de l’assurance responsabilité civile générale, en ce qu’elle couvre tous les intervenants sur un chantier de construction (maître d’ouvrage, propriétaire, promoteur, entrepreneur général, gestionnaire, etc.). Comme l’énonce son titre, l’assurance responsabilité civile chantier assure contre les dommages matériels résultants « d’opérations de construction sur un chantier donné. »[1]

Étant spécifique aux opérations de construction en lien avec un chantier donné, l’assurance Wrap-Up assure contre les risques qui ne sont pas couverts par l’assurance chantier (Builder’s Risk). Dès lors qu’un dommage matériel résulte d’un sinistre survenu pendant des opérations sur le chantier assuré, l’assurance Wrap-Up entre en jeu. La couverture de base comprend la période entre le début de l’ouvrage et l’achèvement substantiel de ce dernier.

Peut s’ajouter à cette couverture une garantie pour les « produits/opérations parachevés » (Completed Operations Hazard), laquelle vise le sinistre assuré en dehors de la garantie de base, c’est-à-dire « durant la période couvrant l’achèvement substantiel de l’ouvrage jusqu’à l’expiration de la période prévue au contrat […] »[2] Compagnie d’assurances Missisquoi c. Constructions Reliance inc. traite de cette garantie.

Dans cette affaire, Les constructions Reliance inc. (ci-après Reliance) est un entrepreneur général chargé de la construction d’un projet de copropriétés divises. Reliance engage à titre de sous-traitant chargé des travaux de peinture J&K Peinture. Lors de l’exécution de son travail en novembre 2011, un employé de J&K Peinture heurte la tête d’un gicleur dans la cage d’escalier. S’ensuit un dégât d’eau important à l’immeuble. L’assureur du syndicat de copropriété, Missisquoi, indemnise son assuré et se voit ensuite subrogé dans ses droits. Missisquoi poursuit alors solidairement Reliance, la Société d’assurance générale Northbridge, assureur de J&K Peinture, et la Compagnie d’assurance Temple. Northbridge et Reliance s’accordent pour dire que Temple est la seule responsable des dommages causés, en ce qu’elle a émis une police Wrap-Up visant les travaux de rénovations complétés à l’immeuble.[3] Le litige est donc de « déterminer si la police Wrap-Up émise par la compagnie d’assurance Temple couvre la réclamation de Missisquoi. »[4]

Comme expliqué ci-haut, la police Wrap-Up émise par Temple vise plusieurs intervenants, dont le Promoteur et Reliance, les entrepreneurs, les sous-traitants, ingénieurs et autres. S’ajoute à cette police une période de couverture de 24 mois suivant sa fin prévue, soit le 1er mars 2012. Cette garantie pour les « produits/opérations parachevés » ne couvre les dommages découlant des travaux des assurés que s’ils surviennent après l’achèvement des travaux. En l’espèce, la Cour supérieure a tranché en faveur de Temple, puisque les travaux n’étaient pas substantiellement achevés au moment du sinistre et qu’il n’y avait pas d’exception applicable à l’exclusion. Par contre, si une exception à l’exclusion prévue par la police s’appliquait, Temple devait indemniser Missisquoi.

Robinson Sheppard Shapiro, dans son infolettre du 1er mai 2018, rappelle que « The decision […] was the occasion for the Superior Court to clarify the scope of application of wrap-up and Completed Operations Hazard Policies. »[5] En effet, la clarification que fera la Cour d’appel du Québec en ce qui à trait à cette interprétation spécifique des exclusions et des exceptions aux exclusions en matière de polices Wrap-Up pourra guider le résolution de futurs litiges forts intéressants en ce domaine.

[1] Oral, Élif et Caron, Marie-Hélène. « L’état du droit en matière d’assurances dans le domaine de la construction » dans Développements récents en droit des assurances, Service de la formation continue du Barreau, vol 451, 2018, la p 114.

[2] Ibid., à la p 117.

[3] Supra note 1 au para 9.

[4] Supra note 3, à la p 119.

[5] Noël, Chantal. « Wrap-up and Completed Operations Hazard Policies: When do they apply? », [En ligne], URL: http://www.rsslex.com/wp-content/uploads/2018/05/20180501_Chantier_EN.pdf. »

Par Catherine Robin

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