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Droit criminel et pénal

À la recherche de la présomption d’innocence

« C’est le tribunal qui, à la lumière de la preuve qui lui a été présentée, détermine si l’accusé est coupable ou non…»

CHRONIQUE EN DROIT CRIMINEL ET PÉNAL

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Audrey-Elizabeth Picard apica084@uottawa.ca

« Bonjour, vous avez bien joint Présomption d’Innocence, je suis présentement en vacances, laissez un message et je communiquerai avec vous à mon retour, s’il n’est pas trop tard! »

Les articles 7 à 14 de la Charte canadienne des droits et libertés procurent à tous les canadiens et canadiennes des garanties juridiques. Concernant les affaires criminelles et pénales, l’article 11 est particulièrement intéressant. Prenons le temps de lire cette disposition et attardons-nous à l’alinéa d) :

sherlock-holmes-147255_1280« 11. Tout inculpé a le droit :

a) d’être informé sans délai anormal de l’infraction précise qu’on lui reproche;

b) d’être jugé dans un délai raisonnable;

c) de ne pas être contraint de témoigner contre lui-même dans toute poursuite intentée contre lui pour l’infraction qu’on lui reproche;

d) d’être présumé innocent tant qu’il n’est pas déclaré coupable, conformément à la loi, par un tribunal indépendant et impartial à l’issue d’un procès public et équitable; 

e) de ne pas être privé sans juste cause d’une mise en liberté assortie d’un cautionnement raisonnable;

f) sauf s’il s’agit d’une infraction relevant de la justice militaire, de bénéficier d’un procès avec jury lorsque la peine maximale prévue pour l’infraction dont il est accusé est un emprisonnement de cinq ans ou une peine plus grave;

g) de ne pas être déclaré coupable en raison d’une action ou d’une omission qui, au moment où elle est survenue, ne constituait pas une infraction d’après le droit interne du Canada ou le droit international et n’avait pas de caractère criminel d’après les principes généraux de droit reconnus par l’ensemble des nations;

h) d’une part de ne pas être jugé de nouveau pour une infraction dont il a été définitivement acquitté, d’autre part de ne pas être jugé ni puni de nouveau pour une infraction dont il a été définitivement déclaré coupable et puni;

i) de bénéficier de la peine la moins sévère, lorsque la peine qui sanctionne l’infraction dont il est déclaré coupable est modifiée entre le moment de la perpétration de l’infraction et celui de la sentence.

Que devons-nous comprendre ? 

La rédaction de l’article 11 de la Charte est pourtant claire. « Tout inculpé a le droit », cela signifie que toute personne, sans exception, bénéficie de l’application de l’article 11 peu importe l’infraction criminelle ou pénale qui lui est reprochée.

Le droit à quoi ? 

À l’application des garanties juridiques qui sont énoncées aux alinéas a) à i). Puisque ce texte concerne l’alinéa d), décortiquons-le! « Tout inculpé à le droit… d’être présumé innocent tant qu’il n’est pas déclaré coupable, conformément à la loi, par un tribunal indépendant et impartial à l’issue d’un procès public et équitable. » Cela signifie donc que seul un tribunal peut déclarer une personne coupable des infractions qu’on lui reproche et ce, après avoir tenu un procès public et équitable. Un tribunal, c’est le lieu où un juge préside un procès, parfois accompagné d’un jury. C’est l’endroit où le procureur de la Couronne présente ses éléments de preuve afin de démontrer la culpabilité de l’accusé et ce, hors de tout doute raisonnable.

Affaire Jutras 

Dernièrement, des « accusations » ont été portées à l’égard du cinéaste montréalais Claude Jutras. Vous remarquez que le mot accusation a été mis entre guillemets. En effet, pour que des accusations soient portées, il doit y avoir eu une dénonciation auprès des policiers. Ensuite, un procureur portera des accusations et il rédigera ce qu’on appelle, un acte d’accusation. C’est à ce moment que la personne qui fait l’objet de cet acte d’accusation devient un accusé au sens de la loi et qu’un procès suivra pour déterminer sa culpabilité. Les gros titres des journaux ne forment pas un acte d’accusation et ils ne sont certainement pas une preuve. Prenez garde, je ne dis pas que les présumées victimes mentent et le but de cet article n’est aucunement de les attaquer ou de les discréditer. Je vous présente seulement un droit fondamental qui, de toute évidence, a été oublié – le droit à la présomption d’innocence. Je vous rappelle également les rouages fondamentaux du système de justice en matière criminelle et pénale. C’est le tribunal qui, à la lumière de la preuve qui lui a été présentée, détermine si l’accusé est coupable ou non et ce, selon le fardeau hors de tout doute raisonnable. Ce n’est pas le travail des médias. Nous ne devrions pas retirer le travail d’une vie à un homme qui n’a pas été déclaré coupable par un tribunal à la suite d’un procès public et équitable.

Certains crimes sont si odieux que l’opinion publique voudrait retirer tous les droits dont bénéficie l’auteur présumé. Attention, gardez à l’esprit ceci : les droits que vous voulez pour vous, ce sont les droits que vous devez offrir aux autres. 

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